Les derniers salons artistiques du mois 11


Ces derniers temps Paris est assiégé par de nombreuses manifestations artistiques, toutes aussi intéressantes les unes que les autres. Bravant la foule et le mauvais temps, je n’ai pas hésité à me rendre dans certaines d’entre elles rien que pour vous. J’ai donc bouclé mon sac photo pour parcourir le salon GMAC (Paris Bastille), le salon Quatrième image (Paris quartier du Marais) et enfin les Hivernales (Palais des congrès Paris-Est-Montreuil) afin d’avoir un point de vue de l’art qui se fait et de l’art qui se vend en ce moment.

 

GMAC Bastille

 

Le salon d’art contemporain de Bastille est tout simplement impressionnant. Je n’avais jamais pris le temps d’y faire un tour, dorénavant je ne manquerai plus de m’y rendre. 500 artistes répartis tout autour du Port de l’Arsenal, pour ceux qui connaissent. Pour les autres, un petit coup d’oeil aux images vous donnera une idée du temps qu’il faut pour en faire le tour.

 

PB027722bPoint de vue depuis le pont, coté gauche du salon 

 

PB027722Voici le coté droit du salon qui se prolonge jusqu’en face de la place de la Bastille

 

La majorité des artistes étant allergiques aux appareils photos, vous ne verrez aucune image des oeuvres exposées. Par contre, je vais citer trois artistes qui à mon avis méritent que l’on s’attarde sur leur travail. Non pas que les autres ne le méritent pas, mais sur 500 artistes (avec plusieurs dizaines d’oeuvres chacun) au bout d’un moment votre cerveau opère lui-même la sélection et obéit à des critères totalement subjectifs.

Le premier c’est Alain Choisnet, dont j’ai pu voir les sculptures aussi belles que finement réalisées. Allez découvrir l’ensemble de son travail sur son site internet, vous ne le regretterez pas.

Le second c’est Fabien Delaube avec qui j’ai pris le temps de discuter de son parcours et de son oeuvre. Ses toiles sont toutes réalisées avec la même attention du détail et la même qualité de finition. Pour en savoir plus sur son travail cliquez ici.

Enfin Patrick Hitte, qui est un spécialiste des Pin-up. Il m’a séduit par sa technique et sa production. La taille de certaines de ses Pin-up (les silhouettes sur bois font plus d’un mètre de haut) et la qualité dans les rendus sont justes bluffantes.

Il est bon parfois de rencontrer des gens talentueux, sans prétention, qui ne font pas les couvertures de Beaux Arts magazine parce qu’ils n’ont pas d’oeuvres dans des collections de musées. Dans un salon comme celui-là, il est possible de rencontrer de nombreux auteurs et surtout de voir des savoir-faire qui ne sont pas forcément dans les mains de ceux que l’on célèbre.

 

Salon la Quatrième Image

 

Concernant le salon Quatrième image, je pense que pour une première ils ne se sont pas trompés. Le lieu, la sélection, le catalogue d’exposition… tout était au top ! Plutôt que de faire un reportage sur les auteurs, je conseillerais aux photographes de se rapprocher de ce genre d’événement qui a l’avantage de la fréquentation, de la localisation et de la qualité de présentation des images. N’hésitez pas à vous rendre sur leur site internet, il est très complet et bien réalisé pour obtenir plus d’informations sur les exposants ou sur les conditions d’exposition.

 

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Le salon les Hivernales 2013

 

Cette année, j’ai décidé d’arpenter les Hivernales non pas comme exposant mais plutôt comme visiteur. Habitué des salons, j’ai compris que le meilleur moyen de visiter ce genre de lieu c’est 4h avant la fermeture. Une fois ce détail réglé, c’est avec un grand plaisir que j’ai pu déambuler dans cet espace, en toute tranquillité. Les Hivernales se sont distinguées une fois de plus par la diversité et la qualité de présentation des oeuvres. Grâce à l’aménagement et à la surface incroyable des lieux, vous pouviez prendre du recul et apprécier une oeuvre sur la durée. On pouvait réellement pénétrer dans l’oeuvre, exactement comme au musée… les touristes en moins.  

 

Ce salon me plaît de plus en plus pour son coté off. Le fait que les parisiens le boudent est l’un des « charmes » de l’Ile-de-France. Le périphérique étant devenu une sorte de « ligne Maginot » il paraît que le bon goût ne se risquerait jamais au-delà des terres parisiennes. Blague à part, le palais des congrès de Montreuil est un lieu bien connu des amateurs de livres puisque le salon du livre jeunesse s’y déroule tous les ans. Si vous n’y avez jamais mis les pieds, attention à l’effet de perspective !

 

Ce lieu est tout simplement gigantesque et parfaitement adapté aux manifestations artistiques. J’aurais intimement souhaité voir tous les artistes de Bastille dans un lieu comme celui-ci. Il n’y a qu’à observer les photos pour comprendre que des manifestations de grande envergure devraient y avoir lieu plus souvent. Le salon se déroulait sur les deux étages et disposait de tout le confort nécessaire pour s’accorder une halte afin de discuter autour d’un verre.

 

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Cette année, l’invité d’honneur était Vladimir Velickovic un artiste dont les oeuvres ne pouvaient laisser indifférent. Que ce soit par la taille, le sujet ou la technique, n’importe quelle oeuvre de cet auteur vous chahute entre un sentiment de fascination et de malaise. Quoiqu’il en soit, voir des sujets contemporains dans ces proportions est toujours un régal pour les yeux des plus curieux.

 

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Certains espaces étaient aménagés comme de véritables galeries d’art. Les oeuvres bénéficiaient d’assez d’espace pour être appréciées de loin et les murs n’étaient pas surchargés, ce qui vous permettait de ne pas être perturbé par des thématiques contradictoires.  

 

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La femme, source intarissable d’inspiration pour les artistes

 

Il est clair que l’image de la femme était bien présente, tous supports confondus. Si dans un premier temps on regrette l’absence de prise de risque dans le traitement du sujet, on reconnaît sans peine le désir de vouloir la représenter à nue. En parcourant les allées, je n’avais pas fait attention aux nombreuses oeuvres où les femmes étaient présentes.

Ce n’est que lorsque j’ai commencé le transfert de ma carte mémoire sur mon ordinateur que la profusion des images m’a sauté aux yeux. Peintures, photographies, retouches numériques ou encore sculptures, la femme nue apparaît dans diverses situations et cela n’est pas sans nous rappeler les nombreuses images du même type qui prolifèrent aujourd’hui dans les médias.

 

Cette femme est comme en lévitation, voire suspendue. Toute sa tension musculaire était comme palpable sur le papier. La maîtrise du dessin ne fait aucun doute. D’ailleurs ce dessin au crayon n’est pas sans rappeler les études des grands maîtres italiens pendant la Renaissance, avec un traitement des ombres et une attitude beaucoup plus dramatique.

 

PB117762 Sophie Rambert – Chute

 

Un peu plus loin dans les allées, une autre femme nue mais allongée cette fois-ci. Elle est comme plongée dans l’attente, hésitant entre une posture de modèle vivant ou une posture d’auscultation médicale. La précision et la finesse des détails contrastent avec ce fond noir qui nous plonge lui aussi dans l’interrogation. L’air calme du sujet s’oppose presque violemment au traitement des muscles qui ont l’air, quant à eux, en pleine tension. L’écho avec le dessin précédent m’avait tellement surpris que j’étais persuadé qu’il s’agissait du même auteur.

 

PB117752Dominique Renson – Résurrection -huile sur toile – 97 x 162cm 

 

Cette peinture m’a fait penser, dans un premier temps, à une séquence de film qui aurait pu être mise en scène par Larry Clark . On a cette impression d’être le témoin d’une scène mettant en image une jeunesse désoeuvrée, libérée des tabous et des conventions. Que ce soit dans la composition ou dans le traitement des expressions, j’ai aimé l’attitude naturelle des personnages qui pourrait nous renvoyer à une question du genre : Qu’est-ce qui vous dérange ? La nudité ou l’histoire qui a conduit à quitter nos vêtements ? D’autres pourront aussi y voir une référence à la peinture de Balthus dont les mises en scène, les sujets et le traitement des couleurs ne sont pas très éloignés de cette peinture.

 

PB117897 François Bhavsar – Les Amoureux douce soirée à trois – huile sur toile – 120 x 120cm

 

Outre le fait que la peinture suivante est du même auteur, il y a de nombreux détails dans cette toile qui méritaient que l’on s’y attarde. Tout d’abord, le plus évident est la situation de voyeurisme dans laquelle se trouve le personnage en bas à droite de la toile. Outre le fait que nous sommes comme lui, pris au jeu (au piège ?) dans la lecture de l’image, on ne peut s’empêcher de regarder la femme sous toutes ses coutures. C’est en la regardant dans son ensemble, avec ses reflets, que l’on comprend que les miroirs font échos à la scène en arrière plan. En effet, vous apercevrez au fond de la pièce un tableau qui représente lui-même les trois grâces qui est une figure devenue classique en art.

 

PB117893François Bhavsar – l’intimité de la femme – huile sur toile – 147 x 114cm

 

Avec cette toile, j’ai eu la sensation de voir une photo de magazine de mode. Si vous voulez vous en convaincre, feuilletez un périodique à grand tirage et vous trouverez forcément une jeune femme, à l’âge indéterminé, dans une pause faussement innocente avec un animal et un détail qui vous fera tiquer. La platitude de la peinture ne m’a pas forcement choqué, dans la mesure où cela apparaissait plus comme un choix que comme une lacune technique. Le regard de la fille autant que celui du cerf est hypnotisant, et avec cette toile on ne décroche pas facilement du regard des sujets. 

 

PB117802Nathalie Bibougou – Cerf – huile sur toile

 

Cette image fait partie d’une série et partage avec les autres le même traitement infographique (?) qui donne l’impression que le corps se décompose sous la forme de pixels. Elle m’a rappelé une photo d’un corps de femme attribuée à Nefertiti qui émergeait du noir. C’est un peu comme si on nous signifiait que la beauté de tout temps s’est construite sur un rapport de proportion qui, au cours des siècles, n’a jamais vraiment changé.

  

PB117815Georges Dumas – Technique mixte sur toile – 100 x 80cm

 

En parlant de proportion, voilà un corps parfait dans l’oeil de l’artiste qui baigne dans la lumière et se présente au milieu d’une ruine médiévale. Le style n’est pas forcément identifiable et la scène reste classique, mais voilà une image qui a le mérite de résumer ce que beaucoup de photographes tentent de mettre en place depuis des années. C’est-à-dire un corps de femme dénudé, dans un environnement atypique, avec toujours cette volonté de l’utiliser pour nous délivrer un message dans sa forme la plus crue.

 

PB117832Casson Leor – Chamber 1 – photographie – 100 x 70cm 

  

 

 Le portrait, une figure classique mainte fois revisitée

 

Voici à nouveau l’artiste Fabien Delaube avec qui j’ai pu discuter lors du salon du GMAC de Bastille. Il était présent aux Hivernales avec une seule oeuvre. Une chance pour moi d’avoir pu voir l’ensemble de son travail. Si vous ne l’avez pas encore fait, prenez cinq minutes pour regarder l’ensemble de ses portraits sur son site web.

 

PB117748vFabien Delaube – RC – huile sur toile

 

Un portrait tout en texture et en matière qui émergeait littéralement de la toile. Il y a quelque chose d’étrange et de fantomatique dans cette oeuvre. Il y a une émotion palpable et un format qui ne vous laisse pas le choix : une fois devant, on se rapproche et on se recule en permanence, pour jouer avec ce qui est flou et ce qui est net.

 

PB117735Eric Javiol – Sinai – acrylique + huile sur toile 120 x 120cm 

 

Les tableaux sont ici composés de plusieurs visages en carton qui deviennent ainsi des bas reliefs recouverts de peinture et d’autres matériaux. J’aime ici l’aspect original qui s’inscrit dans une démarche rare ainsi que l’implication de l’artiste à exprimer différentes matières, ce qui rend les oeuvres encore plus appréciables en vrai.

 

PB117825Dominique Perréard – Visages, village ardéchois – technique mixte

 

Ce tableau se nomme « la place du peintre », j’y ai vu pour ma part une référence à Shakespeare surement à cause du crâne et de la posture. Dans la série de tableaux que proposait cet artiste il y avait toujours ces formes colorées géométriques qui contrastaient efficacement avec le reste. Personnellement, j’aurais voulu le voir à coté du tableau que je présente en dessous, comme si j’avais besoin que l’on dispose les oeuvres non plus par auteur mais par opposition.

 

PB117886Olivier Poizac – La place du peintre

 

Ce tableau, tout en force et en puissance, nous emmène dans d’autres lieux, d’autres temps. En l’observant de loin j’ai cru qu’il était question d’une référence aux tableaux qui mettaient en scène Bonaparte en conquérant. Finalement, avec plus d’attention, on s’aperçoit surtout qu’il y a un travail sur la matière et la couleur. Ici, « la facture » de l’artiste traduit bien l’énergie au détriment de la précision du tracé du pinceau.

 

PB117743Christian Libessart – Cavalier blanc et argent – huile sur toile – 146 x 114cm

 

  

Des atmosphères qui oscillent entre cinématographie, onirisme et imaginaire

 

Ces peintures dégageaient une véritable douceur, et une sorte de quiétude semblait émaner de ces deux toiles. Même si l’on peut critiquer le choix de les avoir placées aussi près l’une de l’autre, leur disposition permettait de les apprécier à bonne distance.

 

PB117848Berg – La ville endormie – 130 x 130 cm – huile sur toile – Vagabondage- 130 x 130 cm – huile sur toile

 

J’aime ce décor à la perspective complètement déformée, voire exagérée, pour insister sur un angle de vue où l’on se sent à la croisée des chemins. Sur le moment, j’ai même pensé à la sensation que l’on éprouve quand on se retrouve devant le Flatiron building de New York. Dommage que cette oeuvre soit la seule présente, d’autant plus que l’auteur en a fait toute une série avec différents points de vue, tout aussi intéressants. 

 

PB117729Xavier Froissart – Les routes de Babel – huile sur toile – 100 x 100cm

 

Une autre vision d’une ville en perspective avec cet effet de grand angle, mais cette fois-ci en sculpture. Il y avait un travail intéressant de matières et de textures sur cette oeuvre qui faisait partie d’une série.

 

PB117732Frédéric Daty – plaques d’acier rouillées, texturées, soudées entre elles

 

Je dois admettre que c’est le genre de peinture que j’aime parce qu’elle oscille entre fantastique et imaginaire. Une peinture simple et efficace avec une maitrise des détails que seule la vue de la toile originale vous aurait permis d’apprécier.

 

PB117757 Roland Cat

 

Quand le mannequin que l’on utilise pour apprendre à dessiner prend des airs de divinité cela donne une peinture sensible et colorée. Cette vision semble directement issue d’un rêve et on se plaît à imaginer la suite. Cette image a un pouvoir narratif assez fort pour suggérer le début d’une histoire. 

 

PB117777 Nestor Rakhshani – Cyrus – huile sur toile – 100 x 150cm

 

Comme d’habitude, j’ai réussi à trouver le plus bel arbre du salon. Celui-ci a cette particularité d’être composé de deux toiles de grande dimension. La répétition des motifs ainsi que le traitement de la matière et de la couleur donnaient à cette oeuvre toute une dimension contemplative. On se plaît à la regarder de longues minutes sans être dérangé et déboussolé, aussi bien par le fond ou la forme.

 

PB117798Jean François Larrieu – Le rouge et le noir – Technique mixte – 220 x 146cm – Dyptique

 

En conclusion, j’ajouterai que ce salon est un excellent événement qui gagne vraiment à être connu, plus qu’il ne l’est. N’hésitez pas à vous y rendre l’an prochain, vous ne serez pas déçu du voyage. Ce mois-ci il y a encore d’autres expositions et salons intéressants, vous serez bien évidemment les premiers témoins de mes prochaines sorties. 

 

 


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