The Movie Art of Syd Mead : Visual Futurist


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Beaucoup d’entre vous connaissent Syd Mead sans jamais en avoir vraiment entendu parler. Je vous l’avais déjà introduit au sein d’un ancien article (Comment développer une vision créative) que vous pouvez consulter en cliquant ici. Artiste, Designer, Visionnaire… on lui doit quelques uns des meilleurs concept design visibles dans des films cultes comme Blade Runner. Avec ce nouvel ouvrage paru chez Titan Books, l’éditeur nous offre un nouveau point de vue sur les travaux de Syd Mead exclusivement orienté vers le monde du cinéma. Cela nous donne l’opportunité de découvrir les peintures et les dessins réalisés sur plusieurs décennies, par celui que l’on désigne comme étant l’un des plus grands « Visual Futurist » de notre ère. Cumulant les prix et les distinctions, il était temps de publier un ouvrage qui synthétise la majorité de ses interventions dans le secteur cinématographique.

Ce qui rend le travail de Syd Mead si bluffant c’est sa capacité à pouvoir fournir des objets et des décors extrêmement crédibles sur une grande variété de films d’anticipation, comme par exemple avec Strange Days. Et dans le même temps imaginer et peindre des décors complexes pour Star Trek.

 

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Ci-dessus un exemple de peinture montrant la complexité organique et technique d’une entité. Le scénario indiquait qu’il fallait représenter quelque chose qu’aucun homme n’avait aperçu auparavant. Ce type de traitement de surface est devenu un classique de la science-fiction au cinéma, visible aujourd’hui encore.

 

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Les peintures présentes dans le livre bénéficient pour certaines d’entre elles de doubles pages comme celle-ci. Cela nous plonge un peu plus dans un univers où les atmosphères sont palpables grâce à une palette de couleurs qui semblent émerger de l’obscurité.

 

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C’est sans surprise que la partie du livre la plus dense présente les peintures et les dessins de Blade Runner. Malgré le temps, la majorité des concepts sont toujours aussi percutants autant sur le fond que sur la forme.

 

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Ci-dessous, « l’USS Sulaco » qui apparaît dans le film Alien avec sa forme de fusil d’assaut. On apprendra dans les pages suivantes que les premières esquisses sont nées durant un vol retour pour Los Angeles. D’ailleurs, les nombreuses pages qui traitent des dessins du film ressemblent à des esquisses officielles de la NASA pour une station spatiale. Je ne peux que vous inciter à prendre ce livre en main pour y voir toute la démarche d’un Designer dans la recherche de concepts pour des films de science-fiction. C’est un plaisir pour les yeux et c’est d’une grande richesse graphique.

 

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Très peu d’auteurs sont capables de fournir des visuels de qualité dans des domaines aussi différents. Et je ne parle même pas de l’expertise technique du Designer qui a été capable d’influencer des scénarios. Un exemple ? Dans le film The Core c’est toute une réécriture de scénario qui a été envisagée suite aux propositions (ci-dessous) des véhicules d’exploration. En les dessinant, Syd Mead s’est aperçu de la non faisabilité du système comme il était décrit dans le texte. Voilà le genre de détails qui lui ont permis tout au long de sa carrière de se faire un nom. Ceux qui ont vu récemment le dernier Blade Runner ont pu apercevoir non seulement l’influence de son travail passé ainsi qu’une vue de son travail actuel sur un décor du film. Le véhicule de 2017 reprenant le style global de l’ancienne version ne fait que confirmer comment la patte de l’artiste a pu perdurer dans le temps.

 

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Ci-dessous, une vue sur la ville circulaire du film Elysium.

 

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Dans le film Mission Impossible, Tom Cruise doit prendre l’apparence d’un autre homme. Voici quelques esquisses de la machine qui modélise ce nouveau visage dans le film. Une fois encore, le tout est dessiné de manière à rendre plausible sa conception.

 

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Une surprenante direction artistique dans l’aspect global du livre

 

Concernant le livre sur le plan purement technique, j’ai quelques regrets que je vais développer pour que vous puissiez bien comprendre mon point de vue. D’après moi, adapter des dessins qui se développent à l’échelle cinématographique dans un format portrait est une erreur. Cela vaut pour ce livre comme pour d’autres. Je ne cherche même plus à trouver d’explications sur ce point. Je me dis simplement qu’il y a de moins en moins de professionnels dans le milieu de l’édition, comme ailleurs. Pour étayer mon propos, j’ai constaté que de nombreux dessins étaient tronqués, recolorés, réduits et parfois mal scannés. Malheureusement pour Titan Books, j’ai déjà un exemplaire d’un livre du maître, devenu introuvable. Et je ne comprends pas comment et pourquoi on réduit et on recolore un dessin quand on connaît le niveau de précision de Syd Mead.

Si, dans l’ensemble, la publication m’enchante par la variété des projets et le nombre de dessins exposés, diffuser un concept comme sur Strange Days avec une interface cérébrale sans montrer l’esquisse du lecteur de disque est une erreur impardonnable. Syd Mead ne dessine pas des objets fantaisistes. Il s’intéresse à tous les aspects techniques et livre une solution crédible vis-à-vis de l’ambiance du film. On ne montrerait pas un dessin de la « DeLorean » de Retour vers le Futur sans celui du « convecteur temporel » par exemple… Du coup, en notant ce détail, je me suis aperçu que les dessins de la moto de Tron n’étaient pas présents non plus. D’où mon interrogation : combien de dessins manquent encore ? Ci-dessous le lecteur apparaît dans mon livre Sentury et n’est pas présent dans cette nouvelle édition.

 

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Avec le recul, je comprends qu’il est impossible d’obtenir un livre complet sur Syd Mead. Pour cela, il faudrait un éditeur plus ambitieux qui n’hésiterait pas à publier entre 500 et 700 pages, quitte à repenser son livre. Un peu à la manière de ce que l’on peut voir avec des ouvrages sur Ralph Mcquarrie qui vous propulsent à plus de 150 euros pour deux ouvrages. Ou encore chez les éditions Taschen avec des ouvrages de plus en plus massifs et qualitatifs.

 

Des erreurs de mise en page et des choix hasardeux

 

Je n’ai pas pour habitude d’aller aussi loin dans mes critiques techniques concernant des livres. Cependant, quelques détails ne m’ont pas laissé le choix. En cherchant à gagner de l’espace, certaines décisions de mises en page sont plus proches de l’erreur que de la réussite. Voici donc quelques exemples frappant avec cet ensemble d’images qui vont vous montrer comment des manipulations hasardeuses peuvent dénaturer des dessins.

Mon autre livre de Syd Mead, « Sentury », nous sert encore de référence. Il est positionné dans la partie haute de l’image. Vous noterez que mon édition japonaise est plus large et dispose d’un papier de meilleure qualité. A première vue rien de choquant sur l’image, et pourtant en y prêtant attention on s’aperçoit que le dessin (en haut à gauche du premier livre) a été reproduit deux fois dans la dernière édition : une fois avec une conversion de couleurs, et une seconde fois nettoyé de son décor. Histoire d’aller plus loin, le dessin de l’édition américaine a aussi eu le droit à sa conversion colorimétrique.

 
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Détail supplémentaire que vous ne verrez pas précisément sur cette image : la qualité de définition trahit une manipulation digne d’un amateur. Coup de fatigue du graphiste ?

 

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Sentury bénéficie d’une page pour montrer le concept d’une station spatiale. Elle sera réduite et convertie en noir et blanc, et de taille tellement petite dans l’édition de Titan books que je ne l’avais pas remarqué sur le moment.

 
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Sur certains films comme Sandblast ou Forbidden Planet, le choix a été radical. Une page, point barre. Ce qui est bien dommage pour les fans. A l’inverse, Sentury possède plusieurs dessins en pleines pages sur Sandblast. Le résumer à un croquis est assez dommageable de mon point de vue.

 

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Conclusion

 

Malgré les défauts techniques évoqués et les curieuses sélections de dessins, si vous n’avez aucun livre de Syd Mead c’est bien le premier qu’il vous faut. Il vous fera découvrir des interventions sur des films mythiques comme « Short Circuit », Johnny 5 en français. Et vous pourrez observer l’incidence de son travail sur d’autres créateurs, avec par exemple Wall-E de Pixar qui s’inspire du personnage précédemment nommé. Un livre à ne pas oublier ce mois-ci, avec le risque de ne plus le voir disponible dans les semaines à venir. Syd Mead n’étant jamais édité en quantité suffisante, le marché de l’occasion nous dévoile souvent des tarifs astronomiques pour ses anciens livres.

 

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Pour aller plus loin, une petite vidéo de l’excellente émission Tracks sur Arte vous permettra d’y voir encore plus clair sur ce « Visual Futurist » qui est rentré dans l’histoire du Cinéma, du Design et dans le cerveau d’un très grand nombre de créateurs.

 

 
 

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